Ma tourtière laurentienne
S’attaquer aux classiques culinaires a toujours quelque chose d’insécurisant, surtout quand on popote en dilettante. Bien sûr, un chef comme Daniel Vézina peut faire mille et une entorses à la tradition et personne ne s’en plaindra.
Sur le Web, c’est autre chose: outre les habitués d’un site qui lisent les ajouts comme une histoire, au fur et à mesure, la plupart de ceux qui découvrent la recette au fil des années y arrivent via un moteur de recherche; ils étaient à la recherche de LA recette traditionnelle, celle que leur mère a cuisinée comme sa grand-mère avant elle, et gare à vos fesses si ce n’est pas ce qu’ils trouvent au bout de l’hyperlien!
Tout ceci pour vous dire que j’ai fait ma première tourtière hier soir. Une vraie de vraie, de plusieurs pouces de hauteur, et non pas un pâté à la viande, dont vous trouverez une recette par là-bas. Même si c’est la comparaison de différentes recettes de tourtières des différentes régions du Québec, mais surtout du Lac-Saint-Jean, qui m’a inspirée, je n’irai cependant pas l’appeler comme telle: j’y ai fait plusieurs entorses et il y aura toujours un traditionnaliste pour s’insurger!
Que celui-là aille fouiner dans les archives de sa grand-mère. Ma recette sera plutôt une «tourtière laurentienne», appellation qui ne semble fort heureusement pas encore contrôlée… Autant dans mon choix de viandes (où domine le cerf) que dans la bonne idée que j’ai eue de les faire macérer toute la nuit non pas seulement dans les oignons et les épices comme la tourtière du Lac-Saint-Jean traditionnelle, mais aussi dans du cidre de ma région, elle me semble assez bien mériter le titre!
L’aventure a commencé par un sérieux magasinage d’un plat de cuisson adapté. J’ai d’abord considéré les rôtissoires bon marché, mais j’ai finalement opté pour la durabilité d’une cocotte Fontignac (la plus grande ovale, de 37 cm), et au lendemain d’une première utilisation, je suis enchantée de mon choix (même si mon portefeuille prendra quelques semaines à s’en remettre)!
Ingrédients
· 1300 g de viande de cerf rouge
· 1200 g de filets de porc
· 2 suprêmes (env. 500 g) de faisan
· 2 gros oignons rouges émincés
· 1 c. à thé de poivre blanc concassé
· ½ c. à thé de romarin
· 1 c. à thé de thym
· 12 piments de la Jamaïque concassés
· 2 feuilles de laurier
· 15 clous de girofle concassés (ou un peu moins, de l’avis de Djo en commentaire!)
· 1 c. à thé de cannelle pulvérisée
· 750 ml (1 bouteille) de cidre tranquille (sans effervescence)
· 8-9 pommes de terre moyennes à chair ferme, pelées et coupées en petits dés
· Sel de Guérande (au goût)
· 3 préparations de pâte brisée (voir recette)
· 1 tasse de bouillon de poulet (ou plus, si nécessaire)
Préparation
· La veille, coupez les viandes en petits cubes;
· Mettez-les dans un grand bol avec tous les ingrédients de la farce (sauf les pommes de terre, le sel et le bouillon), versez le cidre tranquille, et laissez macérer au réfrigérateur toute une nuit;
· Au petit matin, pelez et coupez les pommes de terre en petits dés et laissez-les tremper dans de l’eau froide au moins 1h;
· Pendant ce temps, préparez la pâte brisée aux épices: faites ma recette trois fois, divisez le résultat en deux boules: une grosse avec le 2/3 de la préparation (pour couvrir le fond et les parois de la cocotte) et une petite et réfrigérez 1h;
· Abaissez la plus grosse boule de pâte brisée au rouleau jusqu’à ce qu’elle soit très mince et couvrez-en le fond et les parois de la cocotte (si vous manquez de pâte, c’est qu’elle n’a pas été suffisamment abaissée… allez, hop! Retournez au rouleau!)
· Déposez le tiers du mélange de viandes au fond, salez, ajoutez la moitié des pommes de terre, un autre tiers de viandes, salez, le reste des pommes de terre, le dernier tiers de viandes, salez et versez le reste de marinade;
· Pré-chauffez le four à 375 F;
· Abaissez la petite boule de pâte brisée et couvrez-en la tourtière, en pinçant fermement à la jonction des deux pâtes, découpez des petites fentes sur le dessus et un trou au milieu (c’est la cheminée, qui fera sortir la vapeur):
· Versez un peu de bouillon par la cheminée, jusqu’à ce qu’il atteigne la hauteur des viandes, mais avant qu’il ne touche la pâte;
· Mettez au four, à découvert, pendant 30 minutes (pour que la pâte se solidifie un peu) puis baissez à 250 F, couvrez et laissez cuire ainsi 4h30, en vérifiant de temps en temps le niveau du bouillon par la cheminée (je n’ai personnellement pas eu besoin d’en rajouter);
· Retirez le couvercle et poursuivez la cuisson 1h à découvert pour dorer la pâte.
À l’origine, tout ceci ne devait être qu’une répétition pour éviter que je fasse une folle de moi en ratant ma première tourtière devant public lorsque nous recevrons toute la belle-famille le 25 décembre, mais ça a senti si bon toute la journée que nous trouvions bien dommage de n’être que deux à l’inaugurer.
Mes parents qui habitent maintenant à quelques minutes en voiture ne se sont pas fait prier pour venir nous rejoindre, et nous avons passé une vraie belle soirée des Fêtes, à manger de la tourtière au rythme endiablé de la Bottine souriante, puis à marcher dans le quartier pour admirer les décorations de Noël.
Ils ont beau être repartis avec quatre grosses portions, il nous en reste assez pour faire les repas de toute la semaine avec de la tourtière! Espérons seulement que je n’en serai pas complètement tannée le 25 au soir ;-)
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Si t’en as vraiment trop, je ne reste pas très loin non plus !!! ;-)
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Tes photos sont bigrement alléchantes !!!!
Je connais « La Bottine souriante ». Je les ai vus à Montréal en Décembre 2001. Et ma foi, la musique de ce groupe semble bien appropriée à la Tourtière laurentienne. -
Quest-ce que j’aurais aimé en manger une comme celle-ci, quand je suis passé au Lac St Jean l’an dernier…
Et quelle photo alléchante…
Merci
François, depuis Versailles -
J’ai fait ta tourtière pour Noël !!! Non seulement je l’ai présentée à 12 personnes mais à au moins 6 originaires du Saguenay-Lac-St-Jean et à au moins 2 personnes qui la font (recette du lac) depuis respectivement 60 et 20 ans.
Résultat : MA recette a remporté la palme.
Seul bémol : trop de clou. L’an prochain, je la referai (d’ailleurs je n’ai pas le choix !) mais il y aura les 2/3 moins de clou.
Merci !
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Wow, djo, merci pour le verdict! Pour les clous, c’est drôle, mais chez nous, ce fut l’inverse: il n’y en avait qu’une petite dizaine dans ma recette, et tout le monde trouvait que ça ne goûtait pas assez! J’ai donc ajusté à la hausse en rédigeant, ainsi que lorsque j’ai refait la recette (avec comme viandes cette fois du canard et de l’oie… à l’orange… hmmm… faudrait que je transcrive mes notes, elle pourrait en intéresser d’autres, celle-là, avec ou sans le clou ;-)!)
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Étrange en effet car pour les 12 (13 avec moi) c’était l’unanimité : délicieux, juste une miette de clou de trop !
C’est comme ça que les recettes, on les copie puis on se les approprie en y mettant notre grain de… clou !
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