Bébé utilise la cuillère en dilettante, généralement pour battre la mesure d’une mélodie imaginaire, parfois pour attraper une bouchée de nourriture et souvent les deux à la fois. Déjà qu’on garde l’aspirateur à portée de main les soirs de riz… je vous laisse imaginer les soirs de semoule! Dans un moment de rare [choisissez entre folie ou lucidité], j’ai déjà envisagé allumer l’appareil et placer l’embout en lieu et place de la bavette…

La plus vieille est dans une passe si-c’est-vert-jaune-orange-j’en-mange-pas (et si-je-mange-un-légume-par-inadvertance-je-recrache).

Bref, il faudrait vraiment avoir l’esprit dérangé pour mettre le couscous aux légumes au menu ces jours-ci. Sérieusement. À deux, elles sèmeraient la terreur dans n’importe quel restaurant berbère.

Et pourtant, qu’est-ce qu’on a mangé, ce soir, chez les banlieusards?

Eh oui. Légumes. Couscous. Couscous aux légumes.

Et elles en ont mangé avec appétit, toutes les deux. Et on n’a pas eu à sortir l’aspirateur.

Évidemment, il y’a un truc: après la cuisson des légumes, j’en ai mis quelques uns en purée que j’ai ensuite mélangée à la semoule. Appelez ça du camouflage ou de la dissimulation: on ne voyait plus de vert, de jaune ou d’orangé identifiable. Que du feu, ou plutôt, de la belle semoule. Avant de servir, j’ai fait un Kent Nagano de moi-même et j’ai fait zigzaguer ma cuillère pleine devant un orchestre imaginaire: aucun dégât, texture parfaite.

J’ai quand même servi des légumes à ma grande, en plus de ceux qui étaient camouflés dans la semoule: ils servaient à la fois de bouc émissaire (il faut bien s’en prendre à quelque chose pour montrer qu’on a le contrôle, dans l’esprit de ma petite terrible-trois-et-demi) et d’alibi (un repas sans légume aurait paru louche)…

Ingrédients

· 2 c. à table d’huile d’olive
· 2 oignons rouges pelés et coupés en 4
· 2 navets pelés et coupés en gros morceaux
· 3 carottes pelées et coupées en gros morceaux (ou prenez un raccourci avec des carottes pré-coupées, comme j’ai fait ce soir…)
· 1 patate sucrée pelée et coupée en gros morceaux
· 3 courgettes nettoyées et coupées en tranches larges
· 1 c. à thé de cumin
· 1/4 de c. à thé de cannelle
· 1/4 c. à thé de graines de carvi passées au pilon
· 1/2 c. à thé de gingembre
· 1/4 c. à thé de thym
· 1 c. à thé de ciboulette
· 1 L de bouillon de poulet (plus ou moins)
· 1 tasse de pois chiches préparés et égouttés

Préparation

· Dans une grande marmite, faites dorer d’abord les oignons, les navets et les carottes dans l’huile d’olive, puis ajoutez les patates sucrées et les courgettes et poursuivez la cuisson pour les faire colorer aussi;
· Ajoutez les épices et les fines herbes, mélangez bien et versez du bouillon de poulet (pour recouvrir) et couvrez la marmite;
· Laissez mijoter environ 40 minutes, ou jusqu’à ce que tous les légumes soient tendres, puis ajoutez les pois chiches et poursuivez la cuisson 5 minutes;
· Servez la semoule préparée dans des assiettes creuses, avec une généreuse portion de légumes.

Pour la semoule
· J’utilise la semoule de blé pré-cuite. Je sais bien que le résultat est sans aucune mesure avec le couscous préparé à la couscoussière, mais les mots « prêt en 5 minutes » sont doux aux oreilles d’une mère un peu serrée dans son horaire. Alors j’assume mes limites. Quelques trucs pour un résultat savoureux: remplacez l’eau par un peu du bouillon de cuisson des légumes et mettez-y aussi une pincée de safran (du vrai, bien sûr).

Préparation de la version camouflée:
· Écrasez les légumes au pilon et mélangez-les à la semoule, en ajoutant un peu de bouillon de cuisson pour ajuster la texture à votre goût (ou plutôt, à celui de vos petits amateurs de légumes qui s’ignorent).

Je n’imagine pas mon couscous sans de bonnes merguez pur agneau pour l’accompagner… mais les fois où ma grande les a goûtées, les larmes lui sont montées aux yeux. Maintenant, j’achète des merguez pour nous, et des saucisses au tofu style hot dog pour les filles. Et la pâte harissa côtoie joyeusement le ketchup sur la table…